HOMMAGE DE FRANCK VENAILLE A SON AMI GIL DESHAYES
Gil en compagnie de Daniel Kutermak et Georges Eo
Il aimait le Red Star ! Durant presque vingt ans j'ai fréquenté Gil, soit dans son café, soit au stade et dans les déplacements.
Son restaurant " chez Gil " à deux pas du stade bourdonnait de toutes les rumeurs, tous les bruits, les renseignements exacts sur le club, sur la vie compliquée du club. Il savait tout. Il répondait à tout.
Je passais le voir trois fois par semaine. On refaisait le monde du football à Saint-Ouen. Avec le temps et les matches j'ai mieux compris le personnage : honnête, pudique, désintéressé.
C'était alors un temps bon à vivre. Le Red Star remontait de la Division d'honneur à ce qui s'appelait alors la D 2.Les jours de match à Bauer, l'équipe déjeunait chez lui J'ai eu la chance de participer à certains repas. C'était le temps de Georges Eo, de Gérard Laurent et d'Amorfini, d'Aniol. Il aimait l'équipe dans sa totalité. Il ne " taillait "
jamais un joueur même après une mauvaise prestation. En attendant l'heure du match les joueurs jouaient aux cartes, aux tarots bien sûr.
Et Gil, avec Paulette, préparait les sandwiches qu'il vendrait plus tard à la buvette du club. Il regrettait d'être occupé durant toute la mi-temps et de manquer des buts. Il avait pris sous son aile un milieu de terrain, polonais, j'ai nommé Jacobzack. Gil a été un
père pour lui. Un jour, un dimanche, en arrivant chez lui, j'ai remarqué un poste de télévision. C'était le cadeau de Gil à toute l'équipe.
Paulette s'inquiétait sans cesse de la santé des joueurs, de la manière dont ils se nourrissaient. Gil se taisait, allumait sa gitane maïs et préparait le match dans sa tête. Les déplacements le rendaient nerveux.
Il voulait récupérer les drapeaux vert et blanc qu'il avait prêtés aux plus jeunes des supporters. 15 étaient sortis.15 devaient revenir.
C'était un homme qui prenait le football au sérieux et nous en avons parlé des heures. C'était l'un de ces "fous" du Red Star, comme Thierry Szenberg, Jean-Claude Crédali, René Balderacchi, Gilles Saillant, et moi. Nous formions presque une société secrète avec son rituel, ses interdits, sa passion. Nous étions là, chaque samedi ou dimanche, à Bauer ou à Gueugnon.
Voilà. Le Red Star peut être fier d'avoir eu de tels supporters qui, c'est arrivé, pouvaient pleurer après une défaite.
Gil savait bien qui était triste et qui faisait semblant. Et le voici, mort tandis que le Red Star vit une nouvelle vie.
Mort ! Mais en laissant derrière lui des images, une atmosphère que je n'ai jamais
rencontrées ailleurs.
C'était le Red Star.
Et c'était l'un de ses fidèles : Gil !
(*) Franck Venaille est un poète (Caballero Hôtel, La guerre d'Algérie), créateur des revues Chorus et Monsieur Bloom, écrivain (La Tentation de la Sainteté), journaliste (France Culture) et fidèle du Red Star parmi les fidèles, qu'il n'oublie jamais de citer dans ses ouvrages.
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