UNE MASSEUSE AU RED STAR
Et oui, si dernièrement, nous avons pu apercevoir dans le staff médical de Bastia, une masseuse, le Red Star a été un précurseur dans ce domaine.
Lors de la saison 69-70, Madame Bedel était la masseuse du Red Star, alors en D 1 (13ème).
Un magazine de l'époque, "Football Magazine" y consacrait un article dans son numéro de décembre 1969.
"Une femme qui masse des footballeurs ce n'est pas courant, non ! C'est même pour l'instant, un cas unique, dans le football français. Nous rassurons tout de suite les professeurs de moralité : cela se passe très bien. Les imaginatifs en seront pour leurs frais.
Madame Bedel est une jeune femme blonde de 28 ans. Elle aurait aimé être pharmacienne : mais férue d'escrime et d'athlétisme, elle pensa que sa voie serait plutôt le professorat d'éducation physique. Elle en commença les études, jusqu'au jour où sa mère atteinte de poliomyélite, fut soignée par un kinésithérapeute. Elle fut frappée par les progrès effectués et sentit naître une vocation.
Ce sont les circonstances qui l'ont amenée à Saint-Ouen : jeune mariée, elle cherchait un appartement. Celui qu'on lui proposa dans cette ville de la banlieue Nord lui plut, et elle quitta le cadre poétique de Milly-la-Forêt où elle avait vécu jusque-là pour cette cité industrielle. Madame Bedel est depuis huit ans à Saint-Ouen. Elle ouvrit un premier cabinet, puis un second, enfin un troisième, plus important évidemment que les autres, au 21, de la rue des Rosiers.
Dans son petit bureau, on peut voir, en bonne place, un ballon rond, signé de tous les joueurs du Red Star. Il y a trois ans déjà, que Madame Bedel, entra pour la première fois dans le vestiaire du club audonien, histoire d'assister à une séance de massage. Puis, petit à petit, des footballeurs vinrent se faire soigner chez elle et cette saison, elle devint officiellement responsable des massages et de tous les soins, concernant les footballeurs du Red Star;
Son mari qui est coiffeur, joue au football et elle avoue avoir une prédilection pour ce sport. Elle s'est sentie tout de suite, de plain-pied, dans l'ambiance ; mais si, demain, on lui demandait de s'occuper de basketteurs, de lutteurs ou de nageurs, elle pense qu'elle ne serait pas autrement dépaysée : "Ce qui compte uniquement, dit-elle, c'est la compétence".
Madame Bedel veut, en effet, ignorer qu'elle est une femme, quand elle exerce sa profession. Son expérience au Red Star semble lui donner raison. Ladislas Nagy nous le confiait un jour "il n'y a jamais eu aucun problème. Le premier jour que Madame Bedel est venue, j'ai demandé aux joueurs, la correction indispensable ; ce qui allait de soi, mais ce fut superflu. Je n'ai d'ailleurs pas eu à revenir sur ce chapitre".
"Je suis effectivement arrivée, un beau matin après m'être annoncée, nous a confié la masseuse du Red Star et j'ai simplement dit : messieurs, par qui commence-t-on. Depuis, je suis parfaitement admise dans cette petite communauté de footballeurs. Tous savent faire la distinction entre l'amitié et la familiarité".
Madame Bedel sait pertinemment que dans les milieux du football on trouve – comment dire – bizarre qu'une personne du sexe féminin "s'occupe" de sportifs. Elle entend remonter ce courant contraire : "C'est très simple dit-elle. Demandez aux dirigeants, à l'entraîneur du Red Star et à ses joueurs ce qu'ils en pensent. Ils sont mes juges.
Dans l'avenir, les équipes féminines se multiplieront. Faute d'un nombre de femmes kinésithérapeutes suffisant, il faudra bien demander à des hommes de masser ces demoiselles. Alors que dira-t-on ?"
Madame Bedel est du genre "décidé" et ne souhaite pas s'arrêter en si bon chemin. Elle veut s'imposer dans les milieux sportifs. Nul doute qu'elle y parviendra.
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