La barque de Lille échouera-t-elle toujours au port ? demandions-nous il y a un an (dans le quotidien Sport), lors de la nette victoire du Racing Club de Paris en finale de la Coupe de France.
Il est de fait que depuis dix ans, les "Dogues", tout en figurant parmi les clubs-vedettes du football français, sont parvenus, deux fois jusqu'à l'ultime rencontre, mais pour succomber par une marge assez nette.

LE PASSE POUR LE RED STAR

Si l'on examine de plus près le palmarès de l'épreuve on peut constater qu'à l'exception de l'Excelsior de Roubaix, en 1933, aucun club du Septentrion ne figurait jusqu'ici dans la liste des vainqueurs. Par contre, Marseille a inscrit six fois son nom sur le socle de la Coupe, Sète a été finaliste à six reprises.
Conclure du rapprochement de ces deux faits que les Méridionaux ont un "tempérament" de Coupe, que les Nordistes n'en possèdent pas, était une démarche assez normale de l'esprit.
Les gens du sud ont les qualités d'enthousiasme et de dynamisme qui s'épanouissent bien dans le doux climat de mai, tandis que les hommes du Nord, plus froids, plus pondérés, semblent incapables de réaliser ces exploits inattendus, ces "renversées" qui créent les situations décisives.
Ces considérations avaient incité beaucoup de gens à envisager avec circonspection la nouvelle tentative du Lille O.S.C.. Certes sur le papier, sa supériorité technique sur le Red Star ne faisait pas l'ombre d'un doute. Mais les Audoniens ont donné dans le passé des preuves si pertinentes de leur parfaite adaptation au genre d'effort exigé par la Coupe, qu'on leur accordait sinon la position de favori, du moins celle d'outsider sérieux.

LE PRESENT POUR LILLE

Ces prévisions n'on pas tenu devant la réalité.
Le Red Star n'a jamais pu secouer le joug que son adversaire lui imposait grâce à son énorme supériorité technique d'ensemble. Un instant, au début de la seconde mi-temps, lorsqu'une belle action d'Aston eût réduit à une marge d'un but l'avance lilloise, on crut que les favoris allaient perdre un match qui était à leur portée.
Une foudroyante réplique nordiste terminée par Vandooren apportait la preuve immédiate que les temps étaient changés.
Si Lille possède aujourd'hui une machine de combat parfaitement réglée, ses cinq avants constituent une cavalerie légère capable de forcer la victoire par son brio, les coups d'éclats individuels et combinés de ses éléments. La jeune aile-gauche Tempowski-Lechantre a réussi de splendides offensives. Le premier, le doute n'est plus permis, est d'ores et déjà l'un de nos stratèges les plus clairvoyants. Ses Passes extrêmement précises, aux trajectoires tendues, ont toujours trouvé l'homme démarqué. Et son efficacité personnelle se manifesta par un tir très sec et placé a ras de terre qui inscrivit le premier point à l'actif des vainqueurs.
Quant à Lechantre, que les Parisiens ne connaissaient pas sous son vrai jour, il a mis en évidence une facilité active et intelligence du jeu, qui en ont fait le meilleur homme de la partie. Et si l'on ajoute aux gestes de ces deux joueurs, la classe incontestable de Bihel, l'activité de l'infatigable Baratte, l'esprit d'opportunité et les progrès de Vandooren, on comprendra pourquoi Lille ne pouvait perdre ce match et pourquoi une solide tradition est en passe aujourd'hui de se perdre.

Premier but de Lille : Lechantre a débordé Planquès, centre en retrait sur Tempowski, qui tir, Germain au sol est battu. Nuevo et Mindonnet (à droite) constate les dégâts.

Réduction du score pour le Red Star, Aston a percé la défense nordiste, Carré à terre, ne peut rien, le ballon arrive sur Moulet qui bat Hatz.